La fuite du soleil, apporte de nouvelle rencontre. [PV Matheus]

Un bruit.
La sonnette venait de retentir.

Levant le nez de son carnet de dessin, en pleine réalisation d'une œuvre absolument pas chaste, il fixa l'horloge qui trônait dans la pièce. Il plissa du nez. Il était rare de recevoir de la compagnie aussi tôt le matin. Les vampires ne s'aventuraient jamais aussi tard, car ils savaient que le soleil allait devenir trop menaçants et les piéger dans l'école, les humains venaient rarement de si bon matin. Mais bon. Peut-être avait-il à faire à un matinal ? Posant son crayon et se redressant, il se dirigea vers la porte de son appartement pour l'ouvrir et, immédiatement, fixer l'individu se trouvant en contrebas.

- C'était bien ouvert.

Dit-il avec son charmant sourire avant de froncer les sourcils. De là-haut, il pouvait le sentir. Cette odeur composite. Une odeur de sang mêlée à celle du brulé par-dessus lesquelles Matheus pouvait discerner une timide odeur de vampire. Etrangement, il avait la sensation que cet homme n'était pas là pour apprendre le dessin. Venait-il de se faire surprendre par les rayons du soleil et son école était le seul refuge qu'il venait de trouver ? Probablement. Mais pourquoi saignait-il ? Venait-il t'affronter quelqu'un ? Quelqu'un qui le poursuivait et qui pouvait potentiellement surgir entre ses murs et foutre la merde ? Fuck. Voilà typiquement le genre de situation qu'il détestait. Une nouvelle odeur alla perturber ses narines. Une odeur qui n'allait en rien arranger l'impression qu'il se faisait de cet homme. Une odeur de suie. Une odeur qu'il connaissait bien, trop bien. Rien que de la sentir, il frissonna.

Un bruit détourna son attention de l'individu pour regarder en direction de la baie vitrée. Dehors, deux véhicules venaient de passer à une vitesse folle, brisant la tranquillité du matin par leur sirène alarmante. Quelque chose venait de brûler. Cet homme était peut-être … victime d'un incendie. Menacé par les flammes, il a surement cherché à s'enfuir. Avec la menace du soleil imminente, il a atterrit ici. L'hypothèse semblait plausible, bien qu'elle n'expliquait pas totalement ses blessures. Peut-être vivait-il en hauteur et il a dû sauter de son logement pour prendre la fuite, se blessant dans sa chute ? Peut-être. Il y avait définitivement trop de peut-être dans sa phrase. Mais bon. Que pouvait-il faire ? Quelle que soit la raison ayant poussé cet homme à venir ici, il ne pouvait plus partir.

- Je reviens.

Lâchant un petit soupir face au non choix qui se présentait devant lui, Matheus disparu de nouveau dans son logement avant de revenir, une petite bouteille à la main. Toujours en haut de ses escaliers, comme par sécurité, il lança ladite bouteille en direction de son hôte imprévu s'attendant à ce qu'il la rattrape. Sans grand mystère, la bouteille contenait du sang frais. Vu l'était dans lequel il se trouvait, cet homme allait en avoir besoin pour retrouver des forces. Si ça se trouve, sans le savoir, il venait de requinquer un mec qui comptait le buter. Un poil trop sympa le brun ? Absolument. S'il venait de lui donner du sang c'était à la fois par pure compassion envers les autres êtes de son espèce, mais aussi car il n'avait pas envie de passer toute sa journée avec un type complètement amorphe et potentiellement en manque.

- Bon. J'ai le regret de vous annoncer que vous allez être coincé ici pour la journée, avec moi.

Lâchant un léger rire, il décida de s'assoir sur les premières marches de l'escalier. Il était toujours en haut. Avant de briser ou non la distance entre les deux noctambules, Matheus devait un peu tâter le terrain et surtout en apprendre un peu plus sur la raison de sa présence ici. Incendie ou … autre chose ?

- Je suis Matheus Howells. Je suis le propriétaire et l'unique professeur de cette école. Ecole de dessin, comme vous pouvez le remarquer.

D'un geste de la main, il pointa le tableau se trouvant à sa droite.

- A qui ai-je l'honneur ?

Un sourire amusé s'échappa de ses lèvres en constatant la réaction du vampire vis-à-vis de son œuvre. C'était toujours amusant de voir que le regard des personnes arrivant en ce lieu pour la première s'arrêtait sur celui de gauche en premier comme attirés par le corps de cette jeune femme se montrant dans son plus simple appareil. Pourtant, des deux œuvres ornant les murs de l'étage, le second état celui qui avait demandé le plus de travail. C'était à se demander pourquoi Matheus sortait de sa zone de confort –  savoir le nu – pour peindre d'autres sujets si personne ne les regardait … Peut-être était-ce car le rendu n'était pas aussi beau qu'il ne le pensait et qu'il devait encore s'améliorer ou bien car de là où ils étaient, les visiteurs ne pouvaient pas admirer la finesse des détails composant la toile ?

- Enchanté monsieur Doubrovski. Et non, ce n'est pas réalisé par ordinateur. Je ne me suis pas encore penché sur l'art digital.

Malgré le fait qu'il avait été attentif à la prononciation de son nom – visiblement d'origine russe – il l'avait mal prononcé. Ainsi donc, il s'agissait d'un jeune vampire. Comment ne pouvait-il pas éprouver de la compassion ? Même si cela faisait bientôt trois décennies qu'il avait rejoint le monde des créatures de la nuit, il se sentait encore jeune. Un jeune vampire. Si déjà lui-même s'estimait jeune, cet Alexeï paraissait être un bébé à ses yeux. Pas étonnant qu'il fasse des erreurs, il en avait fait également. S'il était encore vivant aujourd'hui, c'était uniquement grâce à la surveillance de sa créatrice. Combien de fois avait-il eu envie d'ouvrir la fenêtre le matin pour apprécier la fraicheur de l'air oubliant le danger que représentait les premiers rayons de soleil sur sa peau blanchâtre ? Même pour quelqu'un traumatisé par les brulures, il s'agissait de détails qu'il omettait en étant jeune.

- Il va falloir que vous fassiez plus attention. Vous ne trouverez pas toujours un endroit où vous abriter. Vous avez eu de la chance que je sois sur votre route.

Il hocha la tête avant de prendre une mine embêtée. Il voulait se débarbouiller ? Hm. Que faire ? L'endroit possédait deux salles de bain. L'une était réservée pour ses élèves, l'autre était sa salle de bain privée. Rares étaient les personnes pouvant accéder à la seconde. Il ne connaissait rien de cet individu, la logique voudrait donc qu'il l'envoie dans la première. Cependant, la première ne disposait que d'un matériel rudimentaire. Aucune serviette pour s'essuyer, seulement le rouleau avec du papier qui sortait lorsqu'on tirait dessus ainsi que du savon. A regarder dans l'état où il se trouvait, cet homme allait plutôt avoir besoin d'une bonne douche … Fuck, pas le choix.

- Je ce qu'il faut en haut, montez.

Annonça-t-il dans un profond soupir. Bien sûr, il aurait pu l'envoyer dans l'autre salle de bain et le laisser se démerder. Mais voyez-vous, il correspondait parfaitement à l'expression « trop bon, trop con. » Bien que vampire, son coeur humain dominait encore ses pensées et ses actions. Il pensait encore trop à l'autre. Il n'était pas encore capable de voir l'autre comme un potentiel ennemi.

- La salle de bain se trouve en haut, il faut traverser la chambre. Allez-y. Il y a des serviettes dans le meuble sous l'évier.

Est-ce que cela le dérangeait qu'un parfait inconnu aille dans sa chambre, haut lieu de l'intimité ? Pas du tout. Il fallait être honnête, beaucoup de personnes qu'il ne connaissait peu l'avait pénétré et pas que pour aller pisser. Avant que son invité ne se décide à réagir, Mat était de nouveau entré dans son antre et – machinalement – il avait allumé la radio dans l'optique d'en  savoir plus sur l'incident qui s'était déroulé. Il avait prévu d'aller fermer la porte d'entrée de son atelier lorsque son invité allait se rendre dans la salle d'eau.

Son regard s'arrêta sur son carnet posé sur la table, encore ouvert à la page où il dessinait …
Bon, bon, bon.
La journée n'allait pas être si tranquille que prévue.

Tirant lentement la chaise, Matheus alla se glisser derrière son bureau et regarder son carnet en poussant un soupir. Il avait du travail, mais il ne se sentait pas dans le bon mood pour le continuer La présence d'un parfait inconnu dans sa salle de bain avait de quoi vite le déconcentrer. Il avait pourtant l'habitude d'avoir une personne en face de lui lorsqu'il dessinait, mais le contexte était différent, il était professionnel. Là non, le contexte était juste étrange. Il avait beau tenter de se mettre dans son dessin, qu'un bruit provenant de la salle de bain le déstabilisait. Celui provoqué par la découverte de l'eau froide dans la douche eut le mérite de lui faire arquer un petit sourire au coin des lèvres. Ups, il aurait peut-être dû le prévenir. Un détail qu'il oubliait sans cesse car rare étaient ceux qui prenaient une douche chez lui, et quand ils en prenait une, ils étaient rarement seuls dedans.

Lâchant un soupir d'abandon, Matheus s'écarta de la table, laissant les pieds de chaise grincer sur le sol. Etirant ses bras, il jeta un regard vers la pièce d'eau avant de se lever et se prendre un petit remontant alcoolisé. Adossé contre le plan de travail de son coin cuisine, il regarda sa radio du coin de l'oeil.



Rien d'intéressant.

Finissant son verre, il se décida à faire un peu de tri dans sa bibliothèque. Action caractéristique de la situation dans laquelle il se trouvait : il ne savait pas quoi faire à cause de l'homme dans sa salle de bain. D'ailleurs, ce dernier commença à l'appeler.


Evidemment, c'est quand les informations devenaient enfin intéressantes qu'il devait quitter le salon.  Lâchant un petit « oui » en direction de son invité pour lui faire comprendre qu'il l'avait entendu, le brun se dirigea vers la salle de bain. La fraicheur de la douche lui avait fait perdre son vouvoiement. Tant mieux, le brun allait pouvoir également le tutoyer. Cela allait permettre de briser un peu la glace. Le vampire lui demanda à propos de sa machine, le tout en se présentant à lui qu'avec une vulgaire serviette autour de la taille. Dans un premier temps, Matheus ne répondit pas à sa question. Elle s'était perdue dans un recoin de son cerveau tandis que toute son attention était tournée vers l'anatomie du blond. En arrière plan, une petite voix continuait de se faire attendre sans que Matheus n'y fasse attention.



Le professeur avait l'habitude de voir des corps devant lui. Inconsciemment, il ne pouvait s'empêcher de regarder les détails du corps. Imaginer comment ils pourraient les transposer sur du papier. Imaginer ce qui se trouvait sous le dessous de cette serv… Ups, légère déformation professionnelle.

« Oui bien sûr, tu peux l'utiliser. Je mets généralement sur le programme mixte et la température à 40 degrés. De toute manière, les boutons sont bloqués. Tu ne peux pas mettre plus chaud. Tu as la lessive sur ta droite, l'adoucissant ainsi que les lingette décolorantes si besoin ... » Il lui pointa du doigt un petit meuble dans la salle de bain contenant tout le nécessaire pour avoir un linge propre et soyeux.

Se massant l'arrière de la tête, Matheus regarda de nouveau Klaus. Pendant que son linge se lavait, cet homme ne pouvait pas rester ainsi. Regardant derrière lui, il poussa un petit soupir. « Je peux te proposer des vêtements en attendant. J'en ai à la pelle dans son armoire » D'un geste de la main, il indiqua de son pouce les grandes armoires se trouvant dans sa chambre. « Prend ce qui te convient. » Il allait être la seconde personne lui piquant des vêtements ce mois-ci. C'était à se demander s'il possédait bien une école de dessin et non pas un centre de charité …


« Oh shit. J'ai raté l'info » lâcha-t-il sur un ton plaintif. « Je regarderai sur internet plus tard … »

Ses poils de cul ne supportaient pas le froid ? Tel l'artiste qu'il était, il n'avait pas pu s'empêcher de visualiser la chose dans sa tête. Ni d'une, ni de deux, il lâcha un petit pouffement de rire. L'image était … assez dérangeante, mais le naturel avec lequel ce vampire venait de sortir ça était hilarant. Mon Dieu, sur quel énergumène venait-il de tomber ? Un énergiquement surement. Telle une puce sauteuse incapable de tenir en place, il jonglait d'un sujet à l'autre ne laissant même pas assez de temps à Matheus pour lui répondre. Heureusement d'ailleurs. Il lui épargnait de devoir lui expliquer pourquoi la machine était bloquée sur cette température. Explication qui n'avait rien à voir avec une quelconque économie d'argent, évidemment. Lâchant un petit soupir, il quitta la salle de bain pour retourner dans son salon pendant que son hôte imprévu dévalisant son armoire. Si d'autres seraient dérangés par une telle intrusion dans leur vie privée, ce n'était pas le cas du brun. Il n'avait rien à cacher, du moins, dans cette armoire-là. Les choses plus tendancieuses se trouvaient … ailleurs.  

L'autre se pointa aussi dans le salon. Adossé contre un plan de travail de sa cuisine avec un verre d'eau à la main, Matheus analysa son anatomie une nouvelle fois. Un réflexe qu'il ne pouvait pas s'empêcher de faire.

- Mais de rien.

Souffla-t-il en le regardant prendre place dans son canapé. Buvant une gorgée, il regarda la pendule. Il fronça des sourcils avant de regarder son « invité ». Hm. Que dire ? Que faire ? S'en suivi un petit silence, assez marquant. Silence pendant lequel, le brun essayait de réfléchir à ce qu'ils pourraient faire pour occuper la journée. Il n'était pas question pour lui de dessiner. Il n'arriverait pas à se concentrer. Sauf-ci peut-être il posait pour lui ? Mais bon, c'était un peu weird à demander.

- Okay Moogle, ta gueule.

Oh putain, il avait oublié que sa radio était encore en marche. Et oui, Matheus était un jeune homme « connecté ». Plusieurs de ses appareils étaient reliés à la commande vocale comme sa télévision, sa radio, ainsi que ses lumières. Un petit luxe qu'il s'était permis il y a un moment déjà, simplement car ça le faisait triper.

- Je m'excuse pour … le vocabulaire ? J'avais totalement oublié qu'il était en marche. Euh, hm. Si tu veux regarder un film sur la télévision, je t'en prie. J'en ai plusieurs de disponible sur Netflex. J'ai euh … Du sang dans le frigo, n'hésite pas non plus. Pareil pour les autres boissons. Jus, alcool, j'ai de quoi faire.

Il indiqua les différents endroits où son camarade vampire allait pouvoir trouver ce qu'il lui listait à l'oral. Puis, déposant son verre dans l'évier, il alla se diriger vers sa table pour ouvrir son ordinateur. Son regard se posa sur son carnet de dessin encore ouvert. Il arqua un sourire durant une fraction de seconde avant de le refermer « nope, je ne vais pas le continuer ». Ces deux beaux amants devront attendre un autre jour pour que l'artiste les finissent. Il regarda ensuite l'écran encore éteint de son ordinateur. Qu'allait-il bien pouvoir faire ? Il pourrait rechercher ces fameux informations sur l'incident de cette nuit sauf que … il avait déjà oublié. Ouais, c'est balot hein ? Non, du coup il alla plutôt sur ses pages Instagramme et Fatbook pour poster certaines de ses nouvelles réalisations ainsi que répondre à des commentaires.