Dites, est-ce que l'on se serait déjà rencontré ?

Le physique qui me différencie
Le geste était devenu routinier, presque mécanique depuis le temps qu'il fallait l’exécuter. Le bruit bref de l'interrupteur que l'on actionne fut rapidement succédé par le grésillement d'une ampoule qui s'allume brutalement dans une explosion de vive lumière froide. Le soudain flux lumineux ricoche dans la petite salle de bain terne. Les vêtements chutent sur le carrelage bicolore dans un imperceptible bruissement de tissus, puis, enfin, le corps s'expose dans sa nudité la plus crue sous le jugement désinvolte de l'étendue réfléchissante qui lui fait face. 

Le grand jeune homme d'une vingtaine d'années aux cheveux pâles comme l'hiver s'y scrute avec application malgré un regard morne aussi fade et dépigmenté que sa pupille et sa rétine. Le miroir ne lui renvoyait que peu de chose qui font écho en sa personne. Un corps grand (1m79), mais fin voir même (60 kg) maigre pour certains. Le carénage des côtes est un peu trop prononcé sous la peau maladivement pâle et fragile tandis que l'os de la hanche se montre trop saillant pour que cela ne soit esthétiquement pas acceptable en guise de critère de beauté. 

Une image presque monochrome qui lui fait face, presque, car il y a bien quelques pixels d'un noir charbon dans les tatouages bague graphique qui ornent certains de ses doigts blancs et fins. Et puis, il y a le reste qui se démarque en nuance de roses. Ces diverses cicatrices qui jonchent sa plastique. Celle qu'il voit le plus souvent, la longue bien incrustée dans la paume de sa main gauche et qui lui vaut de peiner à user de ce membre. Une main raide et tremblante aux doigts difficilement mobilisable suite a un sectionnement malheureux de nerfs et de tendons. 

Et forcément, il y a toutes les autres sur son visage aux traits fins et délicats voir androgynes. Ces petites cicatrices-ci et là qui lui donne l'air d'une gueule d'ange tabassée : une petite coupure qui traverse ses lèvres pâles au niveau de la commissure droite, une autre qui sectionne son sourcil gauche. Des reliquats d'ecchymoses de couleurs et de forme variée persistent à ancré sa peau de tâches plus ou moins éparses. Des douleurs résiduelles au niveau de sa mâchoire qui a été cassé, de douleur lancinante au crâne également dû a des fêlures au niveau de l'os frontales et diverses cicatrices qui serpentent dans son cuir chevelu.

Comme toujours rien ne s'agite dans sa mémoire brisée et c'est sur un soupire lasse que l'albinos s'habille rapidement avant de quitter la pièce qu'il finira par rejoindre le lendemain matin. Comme tout les jours.

Le psychologique qui m'habite
Si vous aviez pu connaître le jeune homme qu'il était avait que Ljol n'ai eu son accident et la dramatique conséquence qui en suivit, alors vous pourriez percevoir les diverses nuances du changement dans son caractère et son tempérament. Certains traits se sont exacerbés alors que d'autre se sont amoindris. 

L'albinos n'a jamais été ce que l'on peut nommer une personnalité chaleureuse et expansive, il est -et à raison- souvent qualifié de glacial et inaccessible par son entourage proche ou lointain. À l'origine, ce moyen de défense face à l’hostilité qu'il a perçu à son égard durant la jeunesse n'était qu'une façade en public pour qu'on ne s'acharne pas d'avantage sur lui. Les années passantes, cette façon d'être, c'est naturellement ancrée dans son tempérament. Le grand blanc s’avère être quelqu'un de poli bien que de succin dans ses propos, néanmoins force est de constater qu'il n'est pas toujours pourvu de beaucoup de tact. Son côté franc lui a souvent valu d'être considéré comme désagréable voir franchement insolent. Le jeune homme aime les choses simples de la vie : un bon livre, une tasse de thé, le calme, la beauté d'un paysage automnale. Ljol se satisfait de peu de choses à commencé par une vie simple. Bien qu'il se complaise dans la solitude, il lui arrive ponctuellement de sortir en vue de rechercher la compagnie d'autrui. Il ne va pas forcément aborder qui que se soit, mais le simple fait d'avoir de l'agitation autour de lui, lui suffit.

Lui qui fut jadis reconnu comme étant un provocateur né lorsque l'on venait un peu trop le taquiner, Ljol s'est remplié sur lui-même suite à sa perte de mémoire qu'il espère temporaire. Ce trou dans son histoire l'a rendu paradoxalement bien méfiant face aux autres puis qu'il se demande constamment s'il connaissait cette personne avant ou non, si on n'est pas occupé de ce moqué de lui, mais également bien plus facile à manipuler pour peu qu'on a le doigté nécessaire. Cette brisure dans ses souvenirs est probablement la plus grosse cicatrice que l'albinos trimbale avec lui non-stop. 

Pour un enfant qui a grandi dans les serres d'une femme possessive, Ljol, ne c'est pourtant pas tellement imbibé des peurs de sa génitrice. Bien sûr, il a grandi avec l'idée que le "dehors" était dangereux pour lui, mais il n'a pas de crainte de sortir pour autant. Pas de peur aux origines abstraite pour le jeune homme, ce qu'il craint, c'est de perdre la vue et de finir dépendant du bon vouloir des autres, des craintes justifiées comptent tenu de sa maladie.  À cela s'est insidieusement rajouté la peur de subir de nouveaux caprices de sa mémoire et d'a terme demeuré avec un vide dans ses souvenirs. Ljol n'aime pas être enfermé sans avoir de possibilité de retrait, ce n'est pas réellement de la claustrophobie a proprement parlé. C'est un vestige d'avoir grandi enfermé "pour son bien", s'il sait qu'il a la possibilité de sortir quand il veut, il n'y aura pas de soucis. 

Vampires et Lycans ? C'est devenu le cadet de ses soucis, la probabilité d'en rencontrer ne le fait pas réagir plus que cela. La méfiance ne sera qu'encore un peu plus de mise envers ces êtres surnaturels, bien qu'il ne se sente pas foncièrement menacé par leur existence. 

Le passé qui m'a construit
Raconter l'histoire de sa vie en voilà une activité qui n'est somme toute pas des plus compliquées pour peu que l'on ai quelques facilités d'éloquences et de synthétismes. C'est exactement ce que l'albinos, c'était dit lorsqu'un jeune médecin au patronyme quelconque était venu s’installer d'une fesse sur le lit blanc qu'il occupait depuis quelques jours dans un quelconque service du célèbre Hôpital St-Thomas. L'humain ne c'était pas franchement inquiété de s'y réveiller pour il ne savait quelle obscure raison puisqu'il était coutumier pour lui d'y être reçu pour de nombreux tests et examens de contrôle lié à l'évolution possible de son anomalie génétique et héréditaire qu'est l'albinisme. Le lancinent maux de tête qu'il sentait pulsé dans son crâne ne l'intrigua pas plus, les migraines étant monnaie courante pour lui depuis le début de son adolescence. 

Ljol haussa un sourcil face à l'instance du médecin concernant son histoire, le blanc resta dubitatif, mais ne manqua pas de finalement s’exécuter sans grand entrain. C'est ainsi que le blanc débuta son récit par l’élément classique de toute une vie, sa naissance. 

« Je ne suis pas originaire de Londres, mais cela, vous devez déjà le savoir puisque cela est mentionné dans mon dossier médical. Je viens de Norvège et plus précisément de l’île de Værøy qui se situe dans l'archipel des Lofoten. C'était début janvier et à cette période, il fait quasiment nuit 24h/24h. Mon père a été marqué par ce fait. Ma mère s'est brusquement rendue aux urgences alors que sa grossesse n'était pas à terme, elle en était à 7 mois, car elle, c'était mise à saigné de façon tout à fait anormale. De ce que j'en ai su par la suite, le placenta s'était décroché partiellement et cela mettait nos vies à tous les deux en jeu. J'ai été sorti par césariennes en urgence un 4 janvier 2004. Et comme ce n'était pas assez d'émotion pour une naissance d'un premier enfant, mes parents ont la surprise de voir que j’étais atteint d'albinisme. » 

Le médecin semblait écouter avec attention le récit de son patient et l'incita à poursuivre son récit, car malgré son intérêt, il n'avait pas toute l'après-midi pour s'occuper d'un seul et unique patient. L'albinos émit un bref soupire et aborda rapidement les débuts de son enfance qui ne fut pas des plus mémorables ni des plus intéressants.

« J'ai longtemps été scolarisé à la maison, ma mère avait fini par mettre sa carrière en pause pour pouvoir s'occuper pleinement de moi et de mon éducation. Les conditions particulières de ma naissance l'ont fortement marquée et c'est de cela que lui ai venu son tempérament extrêmement anxieuse et protectrice à mon égard. J'étais trop jeune pour m'en rendre compte à l'époque, mais cette attitude a finalement eu raison du couple de mes parents. Mon père n'a jamais eu une grande place dans ma vie, ma mère me monopolisait énormément sous prétexte qu'elle savait mieux que quiconque ce dont j'avais réellement besoin. À défaut d'avoir des amis de mon âge, je me suis penché vers la lecture. C'est rapidement devenu plus qu'un hobby. 

Avec l'âge, j'ai de plus en plus voulu sortir et rencontré d'autres enfants de mon âge alors j'ai tous fait pour devenir le plus irréprochable et le plus autonome possible. Comme vous vous en doutez convaincre ma mère a été un combat dantesque qui s'est fini dans les cris et les larmes. Moi, j'étais heureux de cette victoire. J'ai donc pu suivre le reste de ma scolarité dans une institution tout ce qui était de plus normal, disons que la désillusion à été intense et rapide. Les enfants étant ce qu'ils sont, j'ai été rapidement mis à l'écart et moqué à cause de ma différence physique... »

Ljol s’arrêta le temps de reprendre son souffle et de s 'humidifier les lèvres, un gémissement de douleur lui échappa lorsque sa langue frôla une sorte de coupure qui traversait sa lèvre supérieure. Avec un froncement de sourcil, il se fit la remarque qu'il ne se souvenait pas s'être blessé ainsi. Puis de nouveau sollicité par le soignant, il délaissa sa pensée pour continuer son récit à la période de son adolescence. 

« Je devais avoir 16 ans quand le couple de mes parents a vraiment commencé à montré des signes de point de non-retour. Un matin, mon père à demander a ce qu'on discute tous les deux, c'est ce jour-là que j'ai compris qu'on ne serait plus jamais une famille unie. Un matin mon père à demander a ce qu'on discute tous les deux, c'est ce jour-là que j'ai compris qu'on ne serait plus jamais une famille unie. Il avait rencontré une jeune femme, plus jeune et plus disponible pour lui. Il en était fou amoureux qu'il me disait. L'infidélité de mon père a eu raison de leur couple déjà souffrant. C'est cela qui a signé le divorce de mes parents. Je suis resté avec ma mère et nous avons quitter la Norvège pour venir nous installer à Londres puisque c'était le rêve de jeune fille de ma mère. Je venais d'avoir tout juste 17 ans vu que nous avons emménagé en janvier 2021 »

Un long silence s'étira après le monologue du jeune homme, le visage de l'albinos semblait en proie à la confusion alors que le médecin l’incitait à poursuivre son récit. La sentence tomba comme un couperet des lèvres du blessé. 

« Je... Je ne sais pas. Nous venons à peine d'arriver, que voulez-vous que je vous dise ?... D'ailleurs, est-ce que quelqu'un à prévenu ma mère de mon hospitalisation ? »

Un air profondément gêné s’inscrivit sur le visage du médecin qui posa une main sur la cuisse du jeune homme.

« Monsieur Nygard, vous êtes arrivé ici après un accident assez important... Vous êtes resté pas loin d'un mois au soin intensif, vous ne vous en souvenez pas n'est-ce pas ? Je me dois d'être honnête avec vous, même si cela sera dur et choquant pour vous... Votre mère est décédée, il y a 10 ans de cela d'une crise cardiaque dans son sommeil et il en est de même pour votre père... Mes plus sincères condoléances... Votre arrivée à Londres date d'environ 11 années d'après nos sources... »

Il n'avait fallu qu'une poignée de minutes pour que la vie du jeune humain ne bascule à jamais, loin d'accepter la chose si facilement, Ljol se déchaîna en une suite de cris hystériques et de pleurs agités. Il refusait d'entendre qu'il avait perdu 10 ans de ce son existence si facilement. 

Amnésie rétrograde qu'ils nomment ça.