Belle et croquante.

Le physique qui me différencie
Ses longs cheveux blonds se détachent tous seuls alors qu'elle se cambre sous le jet de sa douche. Elyzabeth sourit et se fait une raison, elle se passe les doigts sur son cuir chevelu pour bien mouiller sa blondeur et la laver. La mousse finit par couler doucement le long de son dos et de ses hanches osseuses puis de ses cuisses très fines. Elyzabeth ne passe pas beaucoup de temps à manger d'aliments cuisinés et son corps n'est pas vraiment enveloppé. S'étant faite refaire la poitrine, celle-ci ne subit pas les dégâts de son alimentation limitée. Ils sont ronds et blancs comme toute la peau de son corps. Elle n'aime pas bronzer et est très contente que le soleil ne soit pas un visiteur régulier de cette partie du globe.
Un peu de savon glisse le long de son front et vient lui attaquer l'un de ses yeux bleus pâles. Elle se mord sa lèvre inférieure fine et rose en pestant. Avec ses doigts longs, fins mais surtout manucurés, elle frotte son œil en offrant son visage au jet de la douche.
Se rappelant qu'elle n'a pas toute la nuit pour se préparer, Elyzabeth fini de se rincer, coupe l'eau et attrape une serviette posée sur le radiateur. Elle est moelleuse et chaude et la fait frisonner. Une fois sèche, elle s'enduit d'une huile sèche à paillettes prenant soin d'étaler le liquide uniformément sur la peau de son corps d'un mètre soixante-quinze. Elle se sèche les cheveux puis les attache haut sur sa tête pour dégager sa nuque, elle sait qu'il aime poser sa main là et la faire descendre le long de sa colonne pour lui dire qu'il a envie d'elle.
Contente du résultat de son maquillage, elle enfile une robe ample rouge, courte et ouverte dans le dos jusqu'à sa chute de reins, des talons hauts qui feront d'elle un repère dans la foule et enfile un long manteau noir. Elle glisse un petit rouleau de billets dans l'une de ses poches et se sent rassurée d'y sentir son couteau, elle n'avait pas envie de perdre plus de temps à le chercher. Sans se jeter un regard dans le miroir de l'entrée, elle s'élance avec 40 bonnes minutes de retards vers son prochain rendez vous en sachant que son client ne lui en voudra pas.

Le psychologique qui m'habite
Le porche de la maison d'Elyzabeth est neuf mais d'aspect vieillot. La balustrade en vrai bois a de la peinture verte qui caille par endroits quand elle n'a pas tout bonnement été enlevée. Le jardin qui s'étend devant est aussi faussement mal entretenu, les bosquets de mauvaises herbes sont placés trop régulièrement. La musique diffuse une piste en boucle qui fait résonner un faux vent qui secoue des branches inexistantes. Au loin, un écran cache la ville qui entoure le haut du building où Elyzabeth vit. Assise dans une vieille chaise à bascule, elle est perdue dans ses pensées. Riche héritière, Elyzabeth se souvient du temps où elle courrait dans ce luxueux jardin sans se soucier du coût de l'entretien d'une telle tromperie. Non pas qu'elle ait des problèmes financiers à présent mais cette époque d'innocence lui manque. Ses parents lui manquent ainsi que la vie sociale saine qu'ils avaient tressés autour d'elle pour qu'elle évolue facilement dans un monde économique difficile. Elle trempe son index dans son verre de vin et étale la boisson sur ses lèvres avant d'en lécher le liquide. Quelque part, elle est contente qu'ils ne soient plus là. Le monde qu'ils ont laissé suite à leur disparition n'est pas beau. Derrière cet écran de ciel bleu se trouve un fourmillement de manipulations et de violences.
Elyzabeth boit son verre d'une traite. Une goutte s'échappe par l'une de ses commissures mais elle ne l’essuie pas assez vite et le col de sa robe blanche et ample s’en trouve tâché. Elle se lève et s'avance pieds nus dans son jardin.
A vrai dire, elle était surtout contente qu'ils ne la voient pas elle, qu'ils ne sachent pas ce qu'elle fait de son temps libre car elle fournit à Londres une part sûrement non négligeable de manipulations et de violences.
Escorte de luxe depuis maintenant deux années, elle aime cette sensation grisante d'être désirée et d'obtenir ce qu'elle veut de ses clients. Non pas de l'argent mais des objets, des attentions, des mots qui lui donnent une fausse impression de sécurité. Elle aime savoir que c'est elle qui rompra l’enchantement quand elle le souhaitera. Une situation très à l'opposée de ce qu'elle a ressenti lorsqu'on lui a annoncé la disparition de ses parents.
Très renfermée sur elle-même, Elyzabeth construit des personnalités pour chaque personne qu'elle rencontre. Se livrer lui fait peur. A vrai dire, c’est le monde à l'extérieur de cette maison qui l'effraie. Quelque part, l'être ou la chose qui a tué ses parents (parce qu'elle est persuadée qu'ils ne sont pas simplement disparus comme lui dit son avocat et ses foutus papiers de décès) vit encore.
Elyzabeth s'assoie dans l'herbe, puis s'allonge. Son écran forme une bulle autour d'elle, elle ne voit donc pas le vrai ciel. Une main sur le cœur, l'autre dans les cheveux, ses pensées continuent de la mettre en retard.
A travers ces personnages qu'elle construit et offre à ses interlocuteurs, clients ou non, elle s'entraîne à être forte. Elle sait qu'un jour elle se retrouvera fasse à celui qui a fait basculer sa vie et elle sait aussi qu'elle voudra le tuer. A force d'y penser, ce besoin est devenu charnel.
Elyzabeth fait glisser ses doigts dans son décolleté, entre ses seins blancs et se mord la lèvre à sang. Le goût du fer s'empare de ses sens et elle ferme les yeux.
Être escorte lui a également permis d'assouvir un autre besoin. Sous l’œil attentif de ses parents elle n'était pas sortie du sentier qu'ils lui traçaient. Ils avaient sûrement remarqués quelque chose chez cet angelot blond mais ils avaient retenus leurs mots. A présent seule, indépendante et constamment affamée, Elyzabeth peut manger.